Petites Réflexions #3 : Le machinima comme outil de création ouvert
Récemment je regardais une petite vidéo (bon d'accord on m'y a forcé) qui m'a semblé assez intéressante. Alors oui, je sais, c'est un peu long, mais c'est plutôt sympa, sous-titré en français et le présentateur ressemble à une sorte de Tom Hanks chauve. Pourquoi ai-je décidé aujourd'hui d'exhumer une vidéo datant de 2005 ? Parce que je trouve que ce que Monsieur Shirky explique sur les entreprises correspond étrangement à ce que je conçois du machinima.
Institutions vs. Collaboration, c'est la clé du message de Shirky qui met en garde contre l'inefficacité de la forme institutionnelle et la professionnalisation face à la libre collaboration de gens amateurs. Les institutions, entreprises, compagnies, associations tendent à sélectionner leurs membres, à les professionnaliser et à les rendre productif. Ce n'était pas en soi un mal au siècle dernier (ou les précédents), mais une chose terrible nommée Internet bouleverse toute les règles établies dans ce domaine. Car avec l'Internet les outils de collaboration, l'échange de savoir et surtout les coûts marginaux (coût d'une unité supplémentaire) tendent à s'approcher de zéro. Il est donc plus judicieux de rechercher à un instant précis, la personne qui pourra répondre à un besoin que d'essayer de faire plancher le groupe d'ores et déjà acquis et payé.
Quel rapport avec le machinima me direz-vous? Hey bien le site numéro un du machinima international (machinima.com pour ne pas le citer) essaye de faire pour nous ce qu'une compagnie ou institution ferait dans un autre domaine. Le site sélectionne, élitise, voire paye des gens comme Digitalph33r pour proposer du contenu régulier ou de proposer la saga-promotionnelle basée sur Terminator Salvation uniquement en pay per view lors de la sortie du film. C'est aussi ce qu'ont essayé de faire certaines boites de communication en commandant à Rooster Teeth la série PANICS ou UbiSoft avec le machinima promotionnel sur le dernier Splinter Cell.
Mais très honnêtement, où cette institutionnalisation du machinima peut-elle mener? Les idées se réduisent comme peau de chagrin, la structure des créateurs (et des sites de diffusion d'ailleurs) s'oriente dangereusement vers l'oligopole abusif.
A l'exact opposé nous avons des gens comme KBS production arrivés dans le domaine un peu par hasard (un concours de vidéo sur lock-on), n'étant pas particulièrement impliqués dans le milieu du machinima en lui-même et n'ayant sans doute aucunement l'intention de réaliser une suite à leur série. Ils sont venus, ont proposé leurs vidéos et ont laissé une marque indélébile. C'est exactement ce qui me passionne dans le machinima : un art-punk, ouvert à tous comme en parlait Gomo où il est justement possible de s'affranchir du cadre rigide de la production organisée.
Ce que Chris Anderson décrivait comme la Long Traîne (idée selon laquelle l'infinité des rayons sur Internet pousse en réalité les gens à s'intéresser à une gamme de produits, notamment culturels, bien plus vaste) s'applique alors parfaitement au machinima. Pourquoi vouloir reproduire la promotion à outrance de quelques auteurs/œuvres qui gangrène les industries du cinéma et de la musique, alors même que chacun peut visionner gratuitement et (une unique fois s'il le désire) les vidéos (possiblement unique) de n'importe quel auteur?
Car après tout la question n'est pas de savoir quel avenir pour les Olibith, Rod Pulsar ou autres Rooster Teeth, ces créateurs/groupes de créateurs trouveront toujours leur public. Mais plutôt de savoir si à l'avenir nous aurons encore la capacité d'apprécier des vidéos comme Maptacular, car comme nous le rappelle Larry Lessig, la production amateur ne signifie pas nécessairement amateurisme et la création vidéo (incluant le machinima) est, pour notre génération un moyen d'expression puissant au même titre que les sites, blogs, livres ou films traditionnels.
Le machinima accidentel, tant dans sa création que dans sa consommation ne devrait donc pas effrayer mais, au contraire, réjouir tous ceux qui comme nous (et vous ?) voient dans le machinima l'un des medias les plus ouverts, accessibles et représentatifs de notre génération. Inutile de vouloir voir en grand, de chercher à planifier, à cadrer et au final à institutionnaliser le machinima, là n'est pas sa vocation. Mais à l'inverse et comme le disait un bon vieux philosophe : laissez entrer le chaos, il est équitable. J'ajouterai même qu'il est (ça et là) générateur d'idées fantastiques.
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