Plus d'argent, moins d'idées
Il est un phénomène qui nous frappe de plus en plus en regard des productions cinématographiques et vidéoludiques actuelles (je ne m’aventurerai pas du côté de la musique), c’est que les bonnes idées sont régulièrement inversement proportionnelles aux moyens mis en œuvres pour les réaliser. Et ça, c’est vraiment pas glop.
Prenons, comme toujours, le point de départ Halo. Bon, certes, le jeu n’a jamais réellement couru dans la catégorie ‘petit shareware artisanal’, mais tout de même au fil d’un développement chaotique (changement de concept et de plateforme en cours de route), le jeu a vraiment obtenu une identité et des mécanismes de gameplay particulièrement innovants qui le distinguaient des énormes productions d’Id software ou Epic games. Lors du passage à Halo 2 et 3, le budget a considérablement augmenté, l’équipe est devenue bien plus structurée et pourtant les bonnes idées étaient nettement moins nombreuses et l’ensemble prenait nettement moins de risques, assurant son succès planétaire à grand coup de sponsoring sur canettes de soda.
Serious Sam, était également l’un de mes petits favoris, réalisé par une équipe de Croates allumés dans un fond de cave et sans IA. le jeu était une montagne de fun et de folie avec des niveaux qui jouaient la carte de la surenchère absolue jusqu’à un final en apothéose dans la Grande Pyramide. Sa suite Serious Sam II sorti sur xbox et PC, bien que nettement plus jolie semblait également perdre de sa saveur et de cette âme si particulière qui en faisait un grand jeu.
Ce sentiment est encore plus net au cinéma. Et sans revenir sur l’affaire nouvelle trilogie (it still hurts) il est facile d’évoquer les Chroniques de Riddick, suite hollywoodienne de l’excellent Pitch Black, qui s’avère finalement pauvre en bonnes idées et plutôt chiche en cascades gros bras. Pourtant l’équipe reste peu ou prou la même (David Twohy et Vin Diesel en tête) et les personnages devraient suivre une certaine continuité.
Pourquoi donc une telle chute de la créativité avec l’augmentation du budget ?
La solution la plus évidente serait bien sûr la pression des producteurs. Plus gros budget = plus grandes attentes de rendement, et il est de nombreux cas où la créativité a été sacrifiée sur l’autel du grand public. Le phénomène n’est pourtant pas inévitable comme en attestent Gears of War 2 bien supérieur à son prédécesseur sur tous les points ou les films des frères Coens qui réussissent à atteindre un nouveau stade de performance à chaque nouveau film (et nouveau budget).
Mais les exemples sont faciles : GoW 2 reste une grosse mise à jour, voire une version définitive du premier opus tant les ‘idées’ à proprement parler sont anecdotiques et Ethan Coen en tant que propre producteur de ses films s’offre une marge de manœuvre nettement plus importante que n’importe quel réalisateur lambda.
Peter Molyneux nous disait qu’au sein de Microsoft Game Studio il ne craignait pas pour sa liberté artistique, puisqu’il savait où étaient ses limites. Il savait qu’avec les énormes possibilités offertes par le budget conséquent, il y avait des bornes à ne pas dépasser. Pourtant vu ce que le monsieur a réussi a faire, on se dit que la marge de manœuvre est quand même large…
Personnellement je pense que grisés par un certain succès, les auteurs essayent de se battre sur plusieurs front dont ceux auxquels ils ne sont pas habitués comme la gestion d’effectifs plus importants. D’autant qu’en ce qui me concerne, je trouve que de plus en plus de réalisateurs, dépassés par leurs moyens, se planquent derrière une foule de gadgets technologiques et des effets spéciaux toujours plus dingues qui laissent le spectateur sur le carreau avec un sacré mal de crâne. Spectateurs de Speed Racer, Transformers et autres Bournes, je vous salue bien bas.
Peut-on alors, à l’instar de Schumacher (Pas le pilote, ni le tâcheron), sublimer le minuscule face à un gigantisme américain effrayant et scander à qui veut l’entendre que Small Is Beautiful ?
Pas certain en regard de ce bon vieux (vieux car déjà culte) The Dark Knight qui prouve en beauté que l’on peu oser le thème le plus mercatile qui soit (une licence de Comics ayant déjà souffert pas moins de cinq adaptations), des acteurs en vogue (Christian Bâle, le Clark Gable des temps modernes ?) et un budget colossal (180 Millions de dollars) sans pour autant se départir de la finesse d’un film de réalisateur.
De toute façon les réalisateurs de cinéma vraiment malins l’ont d’ores et déjà compris : qu’importe le budget, pourvu qu’on ait la créativité. Si seulement plus de studios de développement de jeux pouvaient comprendre cela…
Divers | BlueHunter | 01 juillet 2009
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