AFK : les rois de la classe au Luxembourg
Samedi dernier, alors que nous avions écumé le repassage de nos derniers mouchoirs et pris dans un élan de folie peu habituel, nous avons décidé comme un seul homme de nous offrir une petite virée au Luxembourg, pays des banques et de la Bratwürst, des stations services et de l'écologie, dans le but de nous payer une petite tranche de machinima théorique au sein d'une exposition organisée au Casino de Luxembourgville. Je veux dire : est-ce qu'on aurait mieux fait de rester chez nous à regarder de la choucroute en pot exploser contre le sol ? Peut-être...
Récapitulons donc. Le mardi 22 Mars, et alors même que l'exposition est présentée depuis le 29 Janvier, Machinima.fr informe la population qu'au Casino Luxembourg se déroule une exposition plus ou moins en lien avec le machinima. Il n'en faut pas plus pour piquer notre curiosité et nous pousser à inspecter de plus près l'événement. On comprend alors vite que la fine équipe de l'Human Atopic Space est à l'origine de l'initiative. Pas réellement surprenant si l'on considère qu'à part ce collectif, Machinima.fr et Jeux Online les jours de fête, personne n'a vraiment l'air de s'intéresser au Machinima en France (et encore moins au Luxembourg).
Armés de notre courage et d'une multipla nous voilà donc partis pour la capital de l'abonnement téléphonique. Sur place la réceptionniste du Casino est bien en peine de nous parler de la projection de "Machimania", ce "komputer art" qui ne lui inspire visiblement pas grande confiance. Une fois installés sur une chaise de la bibliothèque du casino reconvertie en salle de projection première déception : ce n'est pas l'enthousiaste Margherita Balzerani qui nous accueille mais le taciturne imagineur Frederick Thompson qui semble assez confus dans sa présentation : "Bon ben, on va vous passer une sélection de machinimas et heu... Ce sont des films réalisés avec des jeux vidéo et ça a été inventé dans les années 80 heu... ça vient de machine cinéma et animation et heu... voilà il y a plusieurs genres...".
On repassera pour l'explication passionnée, les connaisseurs n'en demandent pas plus, les touristes découvriront par eux même.
S'en est suivi la projection des films suivants:
Panic Radio de François Pallin (19min France 2008)
Déjà présenté à l'Atopic Festival ce film de François Babar réalisé dans the Movies insinue une ambiance d'horreur dans le quotidien d'une présentatrice d'émission de radio. Plutôt (très) long, le film introduit des images et des effets intéressants comme ce studio d'enregistrement surréaliste où l'animatrice est toisée par une improbable pile de dossiers. On regrettera un manque de rythme évident, des dialogues superflus et l'utilisation d'un moteur qui se prête difficilement à une ambiance oppressante.
GTAlphaville de Mutatis Mutandis (1min France 2010)
Après le long Panic Radio les HAS ont eu la bonne idée de programmer un film on ne peut plus court avec ce petit GTAlphaville de Mutatis Mutandis (parait qu'on peut les trouver en googlant ça). Une minute et quatorze secondes dont 1min tirée de Alphaville de Gordard. Une mise en parallèle intéressante, mais qui peine à dépasser le statut de jolie anecdote.
The Graveyard de Rohan Fermi (4min Allemagne 2009)
Réalisé dans le jeu indé éponyme, the Graveyard mets en musique la (dernière?) balade
au cimetière d'une personne âgée. A défaut de proposer un rythme entrainant la ritournelle est sympa et les paroles plutôt trash. Le tout est cohérent et mérite clairement le visionnage. Le top du top du machinima Allemand quoi!
A change of art de Luxaeternam (17min France 2010)
Retour au terrain connu avec ce A Change of Art qui nous raconte pendant 17 looongues minutes les agissement d'une sorte d'organisme chargé de la protection de l'art qui décide de ramener un photographe peu scrupuleux dans le droit chemin. Idée de départ très intéressante mais hélas minée par un réalisateur en roue libre, une qualité d'enregistrement des voix médiocre, un montage poussif et une fin complètement absurde où l'on découvre qu'un vrai artiste s'enferme dans un monastère, jette ses t-shirt trendy et fait de la peinture. Et oui ni plus ni moins. Une création boiteuse au service d'une idéologie grotesque.
Lovely Family TV de la lovely team (3min France 2010)
Je tiens à préciser qu'à ce moment de la projection le gros des spectateurs avait déjà fuit la projection. Et c'est fort dommage parce que Lovely Family TV figurait dans le haut du panier de Machinima ce jour là. Déjà aperçu au Festival du Jeu Vidéo 2010; cette vidéo réalisée par des étudiants de Sup Info Com a le mérite d'avoir un message clair et une réalisation tout à fait soignée sous les Sims. On pourra toujours arguer que dénoncer le fait que la publicité vend aux gens des choses dont ils n'ont pas besoin en 2011 c'est un peu enfoncer des portes démolies il y a bien longtemps, mais enfin, ça donne un peu envie d'aller faire la révolution ce n'est donc pas totalement mal.
Dagon de Trace Sanderson (8min Royaume Uni 2010)
Dagon est adapté de la nouvelle du même nom de Lovecraft. Pas forcément l'auteur le plus simple à transposer en film, sans doute encore moins en machinima. Pourtant l'idée est soigneusement développée à grand coup de narration forte et de modélisations originales. Dommage que le tout manque un peu de punch et que les animations soient aussi peu cadrées, les personnages roulent des fesses comme jamais et même la créature semble effectuer quelques pas de danse. A noter que pour un machinima reposant presque intégralement sur sa narration il a été projeté sans sous-titres.
Over Data de Marco Manray (3min Italie 2010)
Un machinima italien de 3min, sans narration ni musique, réalisé sous Google Earth? Voilà typiquement le genre de film qui a sa place dans un musée! L'idée est loin d'être bête : utiliser google map en retirant la texture de sol de manière à obtenir une carte créée de toute pièce par l'activité humaine référencée. On ne voit plus des villes, des cours d'eau, des montagnes, mais bien des autoroutes, des mcdonalds et des stations essence. Différentes villes sont passées à travers ce drôle d'objectif (Paris, New York, LA etc.) qui donne une vision inédite de notre monde.
Welcome to the desert of the real de Paolo Petercini (6min Italie 2010)
Autre machinima Italien, Welcome to the Desert of the Real est une sorte d'anti-propagande mettant en parallèle des images d'un soldat qui marche seul dans le desert et la description des syndromes de stress post-traumatique.
L'idée curieuse devient particulièrement lorsque l'on comprend que la description provient du ministère Américain de la défense et que le moteur est celui du jeu America's Army, outil de promotion et de recrutement de l'armée Américaine. L'ironie est bien trouvée.
The Stolen Child de Lainy Voom (2min Royaume Uni 2009)
The Stolen Child est la mise en image d'un poème de WB Yeats. Second Life sert de support et est, pour une fois, particulièrement bien mis en valeur avec de environnements très originaux qui collent vraiment bien au poème. On évite également les animations foireuses, les chutes de framerate et les textures louches. Du beau travail.
INtervention de Phil Rice (4min Etats Unis 2009)
Déjà présent à Atopic 2009 INtervention monte, à l'envers, la fuite d'un personnage dans GTA4. Pourquoi court-il? Que fuit-il? Vous ne le saurez qu'en regardant ce court machinima bien foutu les potes.
The Body is obsolete de Chantal Harvey (uk 2009)
Cette infâme vidéo lauréate du 3e prix du public à Atopic en 2009 se présente comme le collage baclé d'une bande son ignoble sur une vidéo à peine moins abominable. C'est, apparemment, la transposition en Machinima de la performance d'un certain Stelarc, body artiste Australien allumé qui croit dur comme fer à un corps comme architecture évolutive pour de plus grands projets via des implants ou des prothèses électroniques. C'est long, mou, inintéressant et faussement provocant. De la méta-branlette dans toute sa splendeur.
mAdvertising de Pooky Amsterdam (2min Etats Unis 2010)
mAdvertising réconcilie Machinima et féminisme primaire. Sans doute après avoir avalé un peu trop d'épisodes de Mad Men, Pooky Amsterdam nous propose de revoir la place de la femme dans second life. Ça manque un peu de profondeur tout ça.
Hotel de Benjamin Nuel (France 2009 - 2010)
Enfin la projection s'est achevé par la diffusion successive des trois épisodes de la série Hotel de Benjamin Nuel, une série complètement barrée ou l'absurde et Counter strike font bon mélange. Dans un château mis sous cloche une bande de terrorise et de section d'assaut glandouille paisiblement entre lutte gréco-romaine et tournois de volleyball. Enfin cela jusqu'à ce qu'une d'événements singuliers se produise, et si le voisin poulet franchouillard n'était pas étrangé à tout cela ?
Financé en partie par le programme Dicréam du CNC, Hotel lorgne du côté d'un Lynch qui aurait bouffé un clown. C'est très particulier, ça n'a pas beaucoup de sens, mais on rigole pas mal et certaines scènes sont vraiment très ingénieuses.
Voilà après plus d'une heure et demie passé devant les écrans quelle bilan tirer cet atelier Machinima?
Ho non attendez, on ne nous a pas demandé, on ne nous a même pas parlé en fait. Le personnel du casino était trop content de nous foutre dehors (et oui vous comprenez il était déjà 18h13 alors...), l'équipe organisatrice avait disparu aussi vite qu'elle avait présenté les films et avant même que l'on ait pu réaliser quoi que ce soit nous nous retrouvions dehors à faire la queue chez McDonald pour profiter d'un chausson aux pommes.
Un peu déçu donc par une projection sans âme et composée uniquement de films difficiles d'accès (où sont les bill & john, les Red vs Blue ?). Une après midi morose finalement où le Casino Luxembourg a démontré que cet art virtuel du machinima ne se lie pas toujours très bien avec un peu de communication humaine et bien réelle et c'est bien dommage.
Tant pis, ce sera pour une prochaine fois.
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